Artiste/Groupe:

Queensrÿche

CD:

Condition Hüman

Date de sortie:

Octobre 2015

Label:

Century Media Records

Style:

Heavy Metal

Chroniqueur:

Blaster Of Muppets

Note:

16/20

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Depuis un peu plus de deux ans, Queensrÿche met tout en oeuvre pour se refaire une réputation. Evidemment, cette première phrase va faire des mécontents mais on ne peut nier que beaucoup de fans déçus par l'orientation du groupe lors de ses dernières années (enfin, pas que les dernières, à dire vrai) avec Geoff Tate, son ancien frontman, ont fini par lui tourner le dos... Mais Tate s'est fait limoger, ses ex-acolytes ont engagé le phénoménal Todd La Torre et ont proposé un album imparfait mais, pour beaucoup (les mêmes déçus dont on vient de parler), bien plus enthousiasmant que la plupart des sorties précédentes du fameux combo. Moi-même, j'ai été assez enthousiaste à la sortie de Queensrÿche en 2013. Enthousiaste mais pas complètement conquis. Revenir au style et au son de l'âge d'or ne suffit pas. Il y avait quelques bonnes compos, c'était plus énergique et plus "metal" et La Torre chantait de façon incroyable (trop calquée sur le Tate des années 80 disent certains... et ils n'ont pas tort), c'est vrai. Mais à côté de ça, l'album était trop court, la production était perfectible et quelques morceaux n'étaient pas inoubliables. Alors, je le reconnais, je me suis un peu emballé à l'époque. L'album était bon... mais pas si bon. Aujourd'hui, j'attends de Queensrÿche quelque chose de plus fort et abouti. Est-ce le cas avec Condition Hüman

Ce nouvel album confirme la direction prise avec Queensrÿche mais va un peu plus loin. Très vite, je sens que certaines de mes attentes vont être comblées. Première constatation avec Arrow Of Time qui ouvre les hostilités : le son est de meilleure qualité. Et ça se confirmera par la suite, l'album est mieux produit que son prédécesseur, c'est un fait. Deuxième bon point : le cru 2013 durait trente-cinq minutes et laissait un goût de trop peu, cette année il comprend douze pistes et affiche cinquante-trois minutes au compteur. Reste à savoir si les nouvelles compos valent le détour.

Le début du disque est résolument heavy et rythmé. Arrow Of Time propose un tempo rapide, et des harmonies de guitares old-school... Il y a même un ou deux "Fight!" guerriers et un peu de double grosse caisse en fin de parcours. Queensrÿche confirme qu'il a complètement tourné le dos à tout ce qu'il a pu sortir ces derniers temps et revient au style qui l'a rendu populaire dans les années 80. Cette envie de revenir à une musique, certes toujours mélodique, mais plus metal se confirme avec Guardian. Le chant de Todd La Torre est impressionnant, le Canadien excelle toujours dans l'art d'imiter son prédécesseur mais se permet quelques montées agressives étonnantes qui n'ont rien à voir avec du Tate. Il faudrait qu'il le fasse plus souvent. La rythmique est solide, les mélodies accrocheuses et les guitares incisives (chouette riff, soit dit en passant).

Avec Hellfire, au tempo un peu moins enlevé, on est bien en présence d'un Queensrÿche qui semble échappé du milieu des années 80. Toujours heavy, solide et servi par un chant haut perché. Je n'ai pas accroché immédiatement, mais les écoutes répétées ont eu raison de mes premières réticences et la mélodie du refrain a fini par se loger dans un coin de ma tête. Ce début d'album, bien que s'adressant peut-être de façon un peu trop voyante aux nostalgiques, est convaincant. Pas nécessairement bouleversant mais très honorable. Le travail des guitaristes (Wilton et Lundgren) est à souligner et Scott Rockenfield demeure un excellent batteur... qu'il est agréable de retrouver sur des compos énergiques.

Avec les pistes suivantes, Queensrÿche continue de caresser le "vieux" fan dans le sens du poil mais semble se détacher un peu des années 84-86 pour se rapprocher du début des années 90. Toxic Remedy est une compo parfaitement huilée qui se situe à mi-chemin entre Operation: Mindcrime et Empire. Plus l'album progresse, plus il avance dans le temps (sans dépasser l'année 1994, album Promised Land) et se révèle intéressant. Dans les bonnes surprises, on comptera assurément Eye9, plus prog et aventureuse que la plupart des compos de ce cru 2015, mais aussi de belles ballades avec Bulletproof et Just Us. La première est vraiment excellente ! Cela faisait longtemps que je n'avais pas entendu une ballade aussi réussie. Assez sombre, heavy, pas mielleuse... bien équilibrée. La seconde sort les guitares sèches et renvoie plus à un album comme Promised Land. On trouve là une sensibilité et une sobriété appréciables. Mais comme il ne s'agit pas non plus de s'endormir sur cette deuxième moitié d'album, on nous ressert un titre rapide, All There Was, dont le style fait penser à The Needle Lies (Operation: Mindcrime). Le final est très réussi avec la chanson titre, plus longue (pas loin de huit minutes), changeante et complexe. Sur ce titre, Queensrÿche ne s'est vraiment pas loupé et nous offre un morceau classe, épique... avec une ambiance forte. On n'avait plus l'habitude d'entendre ça chez ce groupe (on pense à Road To Madness ou Suite Sister Mary).

Condition Hüman, un album réussi ? Plus fouillé et abouti que le nouveau départ de 2013 ? Le meilleur depuis une petite vingtaine d'années ? En ce qui me concerne, cela ne fait aucun doute. Au-delà de tout reproche ? Je n'irai pas jusque-là. Alors que, globalement, Queensrÿche nous offre de belles choses, quelques compos manquent encore un peu d'accroche ou peinent à surprendre. Le travail est bien fait mais aurait parfois gagné à être plus audacieux. Le groupe ressort les vieilles recettes qui ont fait leurs preuves et s'attribue ainsi l'adhésion des fans de la vieille époque... Cela paraît parfois un peu trop "facile" ou calculé. Et Todd La Torre a beau être très fort, on pourra, encore cette fois-ci, lui reprocher de parfois trop singer le Geoff Tate des glorieuses années. Cependant, si l'on est tout à fait honnête, on notera que le groupe a progressé, que quelques éléments disséminés ici et là semblent révéler un Queensrÿche au potentiel plus actuel (et pas juste rétrograde)... Et sur certains passages, La Torre arrive même à (brièvement) imposer un chant plus personnel. Si la perfection n'est donc pas encore atteinte, Condition Hüman est un vrai bon album, bien fait et solide, qui donne envie de soutenir ce combo qui revient de loin et de l'encourager à continuer sur cette voie.

Tracklist de Condition Hüman :

01. Arrow Of Time
02. Guardian
03. Hellfire
04. Toxic Remedy
05. Selfish Lives
06. Eye9
07. Bulletproof
08. Hourglass
09. Just Us
10. All There Was
11. The Aftermath
12. Condition Hüman