Voyage en terre inconnue m'embarque aujourd'hui à bord de son Drakkar vers une nouvelle destination atypique, l'Islande. Vivant paisiblement entre volcans et eaux glacées, ce petit pays a vu sa notoriété exploser l'été dernier grâce à son parcours à la coupe du monde de football et à ses clappings chaleureux de fin de match. Fort heureusement, l'Islande ne se résume pas à ces considérations médiatiques et lorsque l'on s'intéresse de plus près à ce territoire, on comprend rapidement que ce peuple conserve une âme de viking avec ses nombreuses coutumes locales et ses multiples formations de metal. Narthraal fait partie de ces groupes qui saccagent nos âmes à grands coups de Death Old School. Formé en 2012 à Hafnarfjörður, le quatuor islandais met aujourd'hui les voiles et part à l'assaut de l'Europe avec son premier album intitulé Screaming From The Grave. Affronter les fils d'Odin en personne me condamne à une mort certaine mais j'accepte le combat proposé en espérant défendre mon blason le plus fièrement possible...

Un premier riff strident accompagné d'un tabassage de cymbales et me voilà plongé au coeur de la bataille. Narthraal ne fait pas dans la dentelle et sert une première attaque parsemée de semi-blasts entraînants et de breaks totalement déroutants. Le son est profond à la Entombed et les différents rythmes s'enchaînent à merveille sans me laisser le temps de relever la tête. Le second morceau reste dans l'ambiance Old School des années 90 mais dépasse l'intensité du premier titre grâce à des riffs plus agressifs et un rythme bien plus rapide et dynamique. La voix rocailleuse de Viktor Penalver, vociférant au milieu du champ de ruines Screaming From The Grave, est sacrément flippante et se marie parfaitement avec l'ambiance de terreur distillée par chaque instrument.
Ne parvenant toujours pas à me faire reculer, Narthraal décide alors de changer de stratégie avec une nouvelle attaque inattendue. Million Graves To Fill débute avec un riff Heavy/Atmosphérique captivant avant de s'emballer et de sombrer dans un Thrash/Death destructeur. Je n'avais pas senti l'embuscade arriver et j'avoue que les risques pris par l'ennemi lors de cet abordage ont fait mouche. Les quatre sauvages sont parvenus à me toucher avec leur savant mélange de styles et le solo de gratte monstrueux en guise d'outro ne fait que renforcer cette sensation de déculottée. Cette première perte de terrain ne me décourage pas pour autant et me donne, au contraire, toute la hardiesse nécessaire pour affronter le prochain déferlement de violence des hommes du nord. Malheureusement, Worldwide Destruction n'est pas à la hauteur des précédents combats ; le morceau n'est pas intrinsèquement mauvais mais sonne beaucoup trop heavy à mon goût et s'écarte dangereusement de l'atmosphère morbide proposée jusqu'alors. Ce coup de mou ne dure pas longtemps car Viktor et ses guerriers reprennent du poil de la bête avec un nouveau méfait intitulé Envy. Le quatuor renoue ici avec un Death traditionnel axé sur la puissance du chant et les accélérations diaboliques derrière les fûts. Je frôle ici l'orgasme auditif car le son et les riffs de grattes empestent le Morbid Angel à plein nez. A l'image de leur maître, j'ai d'ailleurs l’impression d’entendre les instruments se lamenter des souffrances que chaque musicien leur inflige. L'ambiance dégagée est odieuse et l'ultime solo en fin de chanson me fait même poser un genou à terre.
Narthraal ne profite pas pour autant de sa supériorité et commet la même erreur en s'enlisant dans une nouvelle joute bien trop heavy. Descent Into Darkness est sans doute un bon morceau mais il demeure hors sujet et sombre dans un Death Atmosphérique que mes pauvres oreilles ne supportent pas. J'avoue que l'hétérogénéité des dernières compositions me déçoit beaucoup car Narthraal ne suit aucune logique et semble même être perdu au milieu du champ de bataille. Blood Path et Symbols Of Hate tempèrent un peu mon agacement en renouant avec les fondamentaux du style prétendument joué. J'insiste sur le "un peu" car malgré plusieurs blasts et quelques cassages de cervicales, les riffs de gratte flirtent trop souvent avec le Heavy ou le Death Atmosphérique. C'est sans doute agréable pour beaucoup de monde mais mon seuil de tolérance musicale est très limité et ces nombreuses violations des lois de guerre me donnent presque envie de ne plus combattre et de rendre les armes.
Heureusement, l'Islandais est un homme fier qui sait écouter et respecter son ennemi. Narthraal revient alors dans les rangs avec deux derniers morceaux au parfum Thrash/Death plus intéressants. Feeding The Pig et Dismember The Entombed conservent quelques relents Heavy mais, dans l'ensemble, l'esprit Death Old School est retrouvé avec des riffs aiguisés, un rythme captivant et une voix sacrément profonde. Ces deux chansons ne révolutionnent rien mais ont au moins le mérite d'être redoutables avec leur cadence et leur son infernaux.

Au final, cette première confrontation avec Narthraal me laisse un goût quelque peu amer car Screaming From The Grave souffre d'un manque flagrant d'homogénéité. Plusieurs titres prouvent que Narthraal possède le potentiel nécessaire pour délivrer une musique sombre et proche de celle de ses aînés mais le manque de maturité se ressent lorsque les influences Heavy ou Death Atmosphérique prennent trop le dessus sur l'identité du combo. Continuez à balancer des compos comme Death Of The Undying, Screaming From The Grave et surtout Envy et vos futurs albums seront une réussite. Dans tous les cas, Narthraal ne peut pas en rester là et devra clarifier sa ligne d'attaque en choisissant son arme, le Death Old School ou le Heavy/Death Atmosphérique...

Tracklist de Screaming From The Grave :

01. Death Of The Undying
02. Screaming From The Grave
03. Million Graves To Fill
04. WorldWide Destruction
05. Envy
06. Descent Into Darkness
07. Blood Path
08. Symbols Of Hate
09. Feed The Pig
10. Dismember The Entombed