Artiste/Groupe:

Khôrada

CD:

Salt

Date de sortie:

Juillet 2018

Label:

Prophecy Productions

Style:

Black Metal Progressif

Chroniqueur:

dominique

Note:

14/20

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Ai-je la sensibilité et les connaissances suffisantes pour juger le travail que Khôrada a produit avec Salt ? Je n’en suis pas certain. Puis-je au moins dire « j’aime » ou « je n’aime pas » ? Pas sûr non plus. En fait l’analyse de Salt est beaucoup plus complexe que cela. Donner ses impressions, oui, possible. Emettre un jugement, probablement pas. Une neutralité toute helvétique qui au final me conviendra pour cette chronique.

Commençons malgré tout par un « j’aime » franc et massif. L’artwork de l’album est simplement génial. A l’image de l’album, dans ce qu’elle véhicule et dans ce qu’elle va faire ressentir à l’auditeur, cette pochette du peintre et sculpteur Cedric Wentworth va diviser. Musicalement, le contenu de Salt devrait également engendrer des clivages. Né des cendres d'Agalloch et Giant Squid, le groupe a réalisé un album oscillant entre black doom progressif et post-punk. Né sur un terrain hostile pour des oreilles non préparées, le disque ne fait pas, ou seulement peu, de concessions à l’auditeur. Le son est lourd, l’atmosphère sombre. Reflet d’une époque trouble dans le lointain Oregon ? En tout cas le groupe le suggère en soulignant que l'album a été écrit «… sous la pression et l’incertitude du début des années Trump, en réponse à la folie actuelle ». 

Si l'on se penche sur le contenu, deux des sept titres de l’album rompent (sur la forme) avec l’esprit black : le mélancolique Augustus et le plus accessible Ossify. Pour le reste la voix et les paroles de Aaron John Gregory sont dures, les guitares de ce même Aaron et de Don Anderson se font souvent violentes, parfois mélodiques et la basse de Jason Walton apporte la couche de fond nécessaire à l’atmosphère. La batterie reste une pièce essentielle de la construction de l’album. Force est de reconnaitre que le travail de Aesop Dekker est excellent. Présent sans trop en faire, capable de rupture rythmique et de gros rythme au sein du même morceau, le gars fait le job. Ses qualités sont d’ailleurs immédiatement perceptibles dans Edeste, le titre d’ouverture. La mise en condition proposée est parfaitement adaptée. Le titre, moins extrême que ce qui va suivre, autorise une entrée progressive dans l’album en laissant même une aire de repos vers la cinquième minute. La fin du titre est plus atmosphérique et poétique. Intéressant.

L’enchainement avec Season of Salt est limpide. Ce long titre passe du black au doom tout au long de ses neuf minutes. Les parties rythmiques sont mises en valeur par des parties mélodiques intéressantes. Celles-ci sont soit portées par des guitares assez joueuses, soit par un travail sur deux lignes de voix mêlées (gutturale et claire). La batterie martiale de Water Rights donne le ton du titre. Les intonations post-punk de ce morceau tranchent avec le chant parlé très dark d'Aaron. Les ruptures rythmiques cassent une possible monotonie et soulignent l’axe résolument progressif de la musique proposée. La fin plus black se termine en un souffle et lance Glacial Gold. Un titre qui s’ouvre comme une ballade mélodique aux teintes desert rock. La migration vers un titre doom est progressive. Le chant d'Aaron renforce l’impression de dépression qui entoure le morceau. La courte ballade folk Augustus ne devrait pas plaire à tout le monde. Personnellement, elle m’offre une pause bienvenue après trente minutes passablement chargées en sons.

Wave State est résolument progressif. La batterie, parfois post-rock, parfois doom ou encore purement black nous guide à travers les presque onze minutes du titre. J’apprécie le travail effectué par les guitares sur les parties mélodiques et sur les riffs ; même si le titre est un peu brouillon à mon goût. Comme un plat qui mélange trop d’épices. Le titre de fin, Ossify, devrait également diviser les auditeurs. En tant que non puriste du style musical proposé, je dirais que j’aime, et même plus. Avec un début psychédélique, genre Orange Mécanique, et un style de fond proche de l’indie-rock, Ossify est moins sombre et plus rythmé. Un titre que je dirais expérimental pour Khôrada. Le format est relativement standard avec une base rythmique solide et des guitares plus joueuses. Sur la seconde moitié du morceau le groupe propose même certains intervalles plus thrash et d’autres plus intimistes. Cet ensemble embellit le titre. Certainement pas au goût des puristes, mais pour moi une bonne conclusion et probablement un joli titre de scène.

Alors, non, je ne crois pas avoir toutes les cordes de sensibilités pour juger comme un pur spécialiste ce Salt. Mais ma fois, au vu de mes maigres connaissances, je pense pouvoir simplement dire que j’ai apprécié l’écoute prolongée du disque, même si j’ai dû faire des pauses afin de mieux appréhender son contenu. Je n’ai pas tout adoubé pour autant, certaines parties étant trop éloignées de ma zone de confort. Mais voilà une sortie intéressante qui a le mérite de proposer quelque chose de différent.

Tracklist de Salt :

01. Edeste
02. Seasons Of Salt
03. Water Rights
04. Glacial Gold
05. Augustus
06. Wave States
07. Ossify

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