Grorr

Artiste/Groupe

Grorr

CD

The Unknown Citizens

Date de sortie

Novembre 2014

Label

Vicisolum Productions

Style

Metal Progressif

Chroniqueur

Lurk

Note Lurk

17/20

Site Officiel Artiste

Autre Site Artiste

C H R O N I Q U E

Grorr est un quintet formé en 2005 à Pau, déjà auteur d'un EP et de deux albums autoproduits, tous conceptuels. Voilà que le groupe revient avec The Unknown Citizens, son troisième album. Je ne connaissais pas encore le groupe avant de me pencher sur son cas à l'occasion de cette sortie, et l'écoute préalable de Anthill ne m'a pas déplu.

The Unknown Citizens est un album conceptuel lui aussi, inspiré par le poème éponyme écrit par W.H. Auden. Ce poème évoque la manière dont un citoyen anonyme est perçu par sa société. Ce personnage n'a aucune consistance et est conforme aux statistiques, fondu dans la masse. La question de sa liberté ou de son bonheur est absurde, "si quelque chose allait de travers, nous l'aurions forcément su".

L'album quant à lui pousse le concept un peu plus loin et s'intéresse à trois personnages différents, chacun étant l'archétype d'un genre particulier de personnalité. Les parties sont indépendantes et les trois personnages ne sont pas forcément liés, mais ces parties peuvent aussi à mes yeux retracer l'histoire d'un seul personnage alors qu'il évolue et change son rapport à la société. 

Musicalement, cela donne un album divisé en trois actes cohérents, mais proposant chacun une atmosphère différant légèrement. Chaque acte est lui-même divisé en trois morceaux. Les sonorités sont assez abruptes, aux confins d'un death très progressif et d'influences djent, mais avec de nombreux instruments plutôt exotiques (entre autres, une vielle à roue ?) travaillant activement à la construction des mélodies. Le son de Grorr est massif, organique et possède un caractère qui lui est propre : d'autant plus sur cet album, le son des guitares est très sec et le jeu est très rythmique, ce qui laisse les instruments non saturés (presque) seuls maîtres de la mélodie. La basse apporte un peu de rondeur au son, même si techniquement elle se fait sévèrement maltraiter. Le chant lui aussi est assez particulier et propose en sus de moments en "chant clair", parfois parlés ou énoncés, parfois riches d'une puissance évocatrice, des growls qui laissent comprendre les paroles, un peu à la manière d'un Joe Duplantier. Son timbre est chaleureux, riche en graves et retransmet bien hargne ou désespoir. 

En cela, les cuivres sur The Fighter – Pandemonium s'y associent parfaitement et donnent au morceau un aspect solennel. Dès ce premier acte, Grorr développe sa puissance et instaure une ambiance prenante. Après un départ solennel, l'ambiance de Pandemonium devient plus inquiétante et sourde, pour développer une espèce de majesté déchue sur Facing Myself. Et où finit un combattant si ce n'est en Oblivion ? C'est avec ce morceau que se termine le premier acte : bien que commençant de manière très imposante, il prendra très rapidement le ton désespéré du combattant perdu au fin fond des enfers.

Avec The Worker, c'est une nouvelle ambiance qui s'installe. L'introduction de Don't Try To Fight… m'évoque par son aspect mécanique le titre Money des Floyds. Les mélodies jouent sur les dissonances et sont tordues, tandis que les riffs rythmiques viennent nous matraquer les oreilles. Effectivement, rien ne sert de se battre, cette première partie nous roule dessus. Mais l'impuissance ressentie par l'auditeur reste raccord avec les sentiments développés durant Oblivion, ce qui me fait penser que ces parties peuvent aussi être l'histoire d'un même personnage qui évolue. You Know You're Trapped… développe des mélodies plus vives et aériennes avec les instruments exotiques tandis que le chant se fait de plus en plus désespéré. Le contraste est intéressant, mais une écoute superficielle du morceau conduit surtout à entendre les mélodies, particulièrement marquantes. But Still Hope… continue à mettre ces magnifiques mélodies en avant et nous transporte en Extrême-Orient, à la Bagdad des Mille et une Nuits ou bien sur les hauteurs du Tibet. Ces deux morceaux font progresser les sentiments de la résignation vers un nouvel état d'esprit, celui du rêveur.

The Dreamer commence avec Unique et le leitmotiv que l'on retrouvera dans tout l'acte, "I'm not a slave". Les trois morceaux seront portés par une ambiance un peu plus complexe à décrire. On y retrouve un mélange d'espoir, de combativité, et un esprit utopiste, pour finir sur une certaine résignation…

Beaucoup de sentiments mêlés dans cet album, voilà ce qu'on peut en tirer. Mais si je viens de vous livrer ici ma vision des choses, elle a eu le temps de bien maturer et est largement différente de celle que j'avais à mes premières écoutes : The Unknown Citizens ne s'aborde pas facilement, et ne se révèlera à vous dans toute sa richesse qu'après maintes écoutes. Je vous le conseille chaudement !

Tracklist de The Unknown Citizens :

01. The Fighter - Pandemonium
02. The Fighter - Facing Myself
03. The Fighter - Oblivion
04. The Worker - Don't Try To fight...
05. The Worker - You Know You're Trapped...
06. The Worker - But Still Hope...
07. The Dreamer - Unique
08. The Dreamer - A New Circle
09. The Dreamer - Alone At Last 

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