Artiste/Groupe:

Greta Van Fleet

CD:

From The Fires

Date de sortie:

Mars 2018

Label:

Lava Records

Style:

Hard Rock

Chroniqueur:

Didier

Note:

16/20

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Houla, je sens que cette chronique va faire des vagues. L’éternelle question de la « profonde influence » qui vire au plagiat et de son intérêt musical : je ramasse les copies dans deux heures. Le débat me rappelle les interminables discussions ente metalleux, lors de la sortie du premier album de Kingdom Come. Vous en souvenez-vous ? La question se repose aujourd’hui et même encore plus : peut-on cautionner un groupe qui s’inspire très/trop fortement d’un de ses ainés, Led Zeppelin, dans le cas présent.

Personnellement je ne peux que constater le plaisir que j’ai eu à découvrir ce jeune groupe. C’est vrai qu’ils refont du neuf avec du vieux, mais c’est très bien fait, c’est fait surtout avec amour et total respect et zéro complexe. Quand on entend les déclarations de Robert Plant sur l’impossibilité de reformer Led Zep, on se dit qu’on pourrait bien se consoler avec les jeunots de Greta Van Fleet. D’autant que Robert, dans une interview récente cautionne plutôt le jeune groupe.

Derrière ce nom de groupe un peu bizarre (on pourra pas dire qu’ils auront réussi grâce à leur nom), se cache une fratrie originaire du Michigan. Dans la famille Kiszka je demande le chanteur Josh, le guitariste Jake et le bassiste Sam (aussi aux claviers par moments – tiens ça ne vous rappelle pas un certain John Paul Jones ?) : bonne pioche et les trois frères créent leur groupe en 2012. Le batteur Danny Wagner les rejoint en 2013. Tout ce petit monde à tout juste la vingtaine et se lance dans le blues rock très fortement inspiré de Led Zeppelin, du fait surtout de la ressemblance choquante de la voix de Josh avec celle de Robert Plant. J’avoue, sur certains morceaux, c’est bluffant. J’ai écouté quelques interviews et les jeunes sont sans complexe, eux qui sont tous nés après la fin du célèbre Zeppelin, ne semblent pas en faire tout un plat. Moi je dis bravo aux parents pour l’éducation musicale ! Ils expliquent aussi que leur nom vient du nom d’une habitante de leur bled du Michigan, Frankenmuth (gasp ?  – ben quoi tu connais pas la scène rock de Frankenmuth ?). Ces jeunes font parler d’eux par l’intermédiaire de la télé, média primordial aux USA, d’abord grâce à l’utilisation d’un de leurs morceaux dans une pub de bagnole. Rebelote quelques temps plus tard avec cette fois un morceau utilisé par la série télé Shameless. Ils sortent ensuite un premier EP (4 titres), Black Smoke Rising (avril 2017). La sphère musicale s’agite, les récompenses pleuvent : Meilleur jeune artiste de la semaine sur Apple Music, meilleur jeune artiste aux Loudwire Music Awards. En novembre, ils sortent un double EP (tiens je connaissais pas cette appellation), From The Fires, qui reprend les quatre titres de Black Smoke Rising, plus deux nouveaux morceaux ainsi que deux reprises (j’y reviendrai). Ce qui fait donc huit titres pour trente-et-une minutes, c’est quand même pas mal pour un EP (un double EP, le monsieur te dit). Le tout a été enregistré aux studio Rust Belt de Detroit avec Al Sutton et Marlon Young aux manettes. C’est de cet EP qu’il s’agit ici puisqu’il n’est distribué en Europe que maintenant.

C’est vrai que la voix de Josh est impressionnante. Aiguë, juste ce qu’il faut, troublante de facilité, capable d’atteindre des hauteurs vertigineuses (Black Smoke Rising), elle est aussi très ressemblante à la façon de chanter de Robert Plant surtout dans les trois premiers opus de Led Zep. Ecoutez juste le cri de de l’intro de Safari Song, les « ho mama », caractéristiques. Comme en plus la batterie lorgne sur les plans de batterie à la Bonham (le plan charley, les roulements), les lignes de basses sont bien travaillées et les riffs de guitare assez crus et acérés, ça vous secoue son homme. Dans Edge Of Darkness, plus posé, le chant reste impressionnant et Jake vient nous montrer de quoi il est capable à la six cordes, en solo, on reste interloqué, même si globalement il reste plus en retrait que son ainé Jimmy Page, assurant surtout de très bonnes rythmiques. Sur la ligne de chant de Flower Power, il va falloir penser à fermer la bouche, pour éviter de baver. Le morceau est mené par une guitare doublée de mandoline, qui fait penser à Hey, Hey, What Can I Do. C’est un pur bonheur, le petits frissons parcourent mon cou « She’s alright, she’s alright », et moi donc…

J’aime aussi beaucoup l’utilisation subtile que fait le groupe des claviers. Par exemple, en mode solennel à la fin de Flower Power (un poil longuet quand même, l’outro), en mode orgue Hammond sur Highway Tune, c’est assez subtil, et toujours bien placé à l’instar de leurs ainés. Highway Tune qui rappelle The Rover, reste par ailleurs un des meilleurs moments de l’album, que je vous fais partager :
   

L’album se termine par un excellent Black Smoke Rising, super groovy, et magistralement chanté, notamment sur le break. Les deux reprises ne sont pas, comme on aurait pu l’imaginer, des reprises de Led Zep, mais plutôt, comme Led Zep le faisait à l’époque des reprises de grands classiques blues/soul/folk des années 60 qu’on trouve dans les albums I et II. La première c’est Change Is Gonna Come, qui est à l’origine un morceau de Sam Cooke, aussi chantée par Aretha Franklin, Otis Redding ou plus récemment Seal. La seconde c’est Meet On The Ledge, du groupe anglais Fairport Convention, formé en 1967 et toujours en activité (respect !). Dans les deux cas, Josh transcende les morceaux de sa voix qui nous fait voyager au cœur des années 60 et prouve que leur culture musicale est profondément ancrée dans cette époque, et qu'on peut aussi ajouter un groupe comme Cream ou Janis Joplin à leurs influences.

Bon je sais que ça va grincer des dents chez les puristes : Sacrilège pour les éternels grincheux (« c’était mieux avant »), ou dieux redescendus sur Terre pour d’autres, le groupe ne laissera certainement pas indifférent. Reste à voir sur le plus long terme ce que ces petits jeunes ont dans le bide. On ne va pas tarder à être fixé, ils annoncent un premier album pour 2018. Pour l’instant ça me plait bigrement et je vais ranger ce petit bijou de hard rock vintage entre ceux de leurs contemporains de Blues Pills et The Answer et de leurs ainés de Led Zeppelin.


Tracklist de From the Fires :

01. Safari Song    
02. Edge Of Darkness    
03. Flower Power    
04. A Change Is Gonna Come    
05. Highway Tune    
06. Meet On The Ledge    
07. Talk On The Street    
08. Black Smoke Rising