Artiste/Groupe:

Gazpacho

CD:

Molok

Date de sortie:

Octobre 2015

Label:

Kscope

Style:

Rock Progressif

Chroniqueur:

Didier

Note:

16/20

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Les Norvégiens de Gazpacho, bien connus de la scène prog, sont de retour. Et si vous les connaissez déjà, vous savez certainement qu’ils ne reviennent jamais juste pour un album avec des morceaux, mais plutôt pour une œuvre musicale, conceptuelle, avec des aspects littéraires mais aussi philosophiques. Gazpacho, excelle dans le progressif minimaliste, étrange, recherché, « intello » diront certains, mais toujours chargé à bloc d’émotion, souvent provoquées par les magnifiques lignes de chant de Jan Henrik Ohm, les apparitions bluffantes d’un violon ou celle d’un solo de guitare.
Le groupe existe depuis 1996 et autour de Jan Henrik, on trouve toujours Jon-Arne Vilbo (guitare), Thomas Andersen (claviers), Mikael Krømer (violon, mandoline), Lars Erik Asp (batterie) et Kristian Torp (basse).
Leur dernier album, Demon, sorti il y a tout juste un an, nous avait déjà particulièrement impressionnés, difficile de croire qu’en si peu de temps, le groupe soit capable d’accoucher d’une œuvre tout aussi complexe et aboutie. Et pourtant ! Le thème de Molok, est assez difficile à énoncer sans démarrer une thèse. Mais pour faire simple ils sont partis des travaux d’un homme à Paris, dans les années 20, sur l’existence de dieu et qui aurait construit une machine, qui en analysant le passé, pouvait déduire l’avenir et au passage prouver l’existence de dieu. La machine en question s’appelait "le Molok", qui est aussi le nom d’un ancien (le plus ancien, selon certains) dieu auquel on sacrifiait des enfants. Bref, ici la science et la religion se rejoignent et fournissent le fil conducteur de l’album. Je l’ai dit c’est complexe, et vouloir s’y plonger complètement n’est pas chose facile. Ne pas s’y plonger complètement, et juste écouter la musique, n’est pas forcément la bonne approche non plus, car on risque d’en ressortir un peu déçu. Il vaut mieux, à ce compte, écouter un album plus facile d’accès des Norvégiens, comme Night, par exemple. C’est aussi mon conseil aux non-initiés. Gazpacho, surtout depuis ces derniers deux ou trois albums, a élevé le niveau de complexité et demande beaucoup plus d’attention pour capter l’auditeur. Ceci étant dit, une fois capté, on est littéralement hypnotisé, et j’en avais déjà fait l’expérience avec Demon.

Pas facile donc d’expliquer, juste, le contenu sonore de l’album. Dès les premières mesures de Park Bench, il est clair, que le minimalisme règne. Pour ceux qui ont tenté l’expérience de Demon, je dirais qu’on repart un peu sur cette lancée. La voix est magnifique, le violon vient vous titiller les tympans assez rapidement (alors que souvent il est utilisé en fin de morceau). Musicalement c’est étrange, pas linéaire pour un sou, mais très mélodique. Les chœurs apportent un côté religieux,  les riffs de guitare et les bruitages apportent un côté inquiétant à l’ensemble. Le morceau enchaine sur The Master’s Voice, assez vaporeux et planant. L’enchaînement suivant nous emmène vers un petit délire de moins de trois minutes, Bela Kiss, où s’alterne violon yiddish et ambiance opéra, qui rappelleraient un peu Queen. Know Your Time est un morceau plus classique du genre rock progressif. Dans Choir Of Ancestors, Jan-Henrik est rejoint par un chœur féminin et Jon-Arne y pose un beau solo de guitare.

ABC est un superbe morceau, c’est probablement aussi le plus abordable de l’album, avec une gros travail de piano de Tomas posé sur un rythme atypique de Lars-Erik. Algorithm, le morceau suivant, est une sorte d’intermède qui fleure bon l’Orient. On se croirait dans un remake de Lawrence d’Arabie. Finalement grâce à Gazpacho, on voyage, pour pas cher. Un CD et un bon casque audio et bing ! On s’envole. Les trois morceaux ABC, Algorithm et Alarm forment pour moi, le meilleur passage de cet album. Alarm nous propose une mélodie vocale à couper le souffle, dans une ambiance (au piano) ponctuée de bruitages des plus étranges, comme possédée (on avait déjà connu ces sensations-là dans certains passages de Demon).

Le dernier morceau, Molok Rising, est à la fois le plus long (plus de neuf minutes) et le plus étrange. L’ambiance est ultra minimaliste, pesante, avec des sons inconnus (un archéologue sonore a travaillé avec le groupe pour y utiliser des instruments primitifs certainement utilisés lors des sacrifices d’enfants au Molok – beurk !)

Ouf ! On ne ressort pas indemne d’un album de Gazpacho. On reste ébahi par la créativité des musiciens, véritables artistes multi talents. Pourtant, il faudra s’armer de patience et lui accorder un certain nombre d’écoutes. Idéalement, il faudrait aussi être capable de lire/écouter les textes, ce qui n’est pas forcément simple (râlez pas, c’est de l’anglais, on aurait pu avoir du norvégien). Gazpacho c’est vraiment une autre façon d’aborder et d’apprécier la musique. Essayez donc ! Une réflexion sur la religion et ses excès, par les temps qui courent, ne peut pas faire de mal…

PS: la rumeur est que le lien suivant (sûrement éphèmère) permet d'écouter l'album en intégralité, histoire de se faire une petite idée avant de l'acheter

 

Tracklist de Molok :

01. Park Bench
02. The Master's Voice
03. Bela Kiss
04. Know Your Time
05. Choir Of Ancestors
06. ABC
07. Algorithm
08. Alarm
09. Molok Rising