Artiste/Groupe:

Eryn Non Dae.

CD:

Abandon Of The Self

Date de sortie:

Mars 2018

Label:

Debemur Morti Production

Style:

Progessif math sludge

Chroniqueur:

JeanMichHell

Note:

14/20

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Au sein de la rédaction, nous avons un débat récurent sur les évolutions artistiques de groupes. Il y a l’école « Slayer » (entre autres…), intègre, avec peu de changements dans la manière de composer en enchainant depuis des décennies des albums qui ne font que renforcer une identité. Ecole dans laquelle j’aurai plutôt tendance à me reconnaitre.


Et puis il y a une seconde école, celle des changements artistiques, celle de l’évolution d’un groupe ou d’un artiste. L’exemple qui nous a fait le plus en débattre récemment est le Magma de Gojira qui, il faut bien l’admettre, n’a rien à voir avec Terra Incognita paru quelques années auparavant, sans parler de la période Godzilla.



Cette introduction me sert de prétexte pour vous parler de Eryn Non Dae., groupe toulousain qui a fait son apparition en 2005 sous le nom de End. avec un premier EP explosif, The Never Ending Whirl Of Confusion. C’est alors l’école de Meshuggah qui est mise en avant avec un niveau déjà tout bonnement hallucinant. Hydra Lernaïa enfonce le clou mais le groupe commence déjà à faire évoluer son œuvre, être simple (enfin ça reste pas simple…) clone des Suédois est certainement trop réducteur et on voit déjà les prémices des évolutions plus atmosphériques. Meliora sera l’album qui confirmera cette tendance.

Et me voici, fébrile, face à ce Abandon Of The Self qui me pose évidemment question, moi qui suis sensible à l’œuvre de Meshuggah, je me pose la question de la direction artistique de ce nouveau méfait. Quelques indices toutefois, comme la tracklist qui me laisse à penser qu’il faudra observer l’impalpable pour apprécier ce nouvel album.


Et j’ai une réponse quasi immédiate à ma question : le titre d’ouverture Astral ne laisse pas beaucoup de temps pour savoir si le groupe a choisi une nouvelle direction artistique, la réponse est clairement oui. L’ambiance est posée, calme, mais oppressante, à l’instar des minutes qui angoissent une future victime qui attend dans une inquiétante torpeur son bourreau. Une simple note, unique, la batterie qui martèle son rythme et le cri déchirant de Mathieu Nogues qui tombe comme un couperet. Sa voix toujours aussi atypique, tout en aspiration, déchire la torpeur, magnifie l’ambiance pour la rendre aussi envoûtante que poignante. Un titre qui dépasse les sept minutes pour une fin frisant l’apocalypse.

Le triptyque d’ouverture est à l’image du titre d’ouverture. Une série d’ambiances bouleversantes qui alterne avec des phases musicales plus âpre qui permettent de varier les plaisirs, à condition d’être dans de bonnes dispositions pour pouvoir l’apprécier. Et c’est là qu’est mon problème majeur, j’ai eu beaucoup de mal à rentrer dans cet album, car il faut pratiquement s’y obliger. Alors certes, j’ai encore dans un coin de ma tête les anciennes aspirations du groupe, et faire mon deuil n’a pas été facile, mais au-delà de ça, j’ai dû m’accrocher sévèrement aux branches pour accepter les propositions du groupe.

Ce sont les titres les plus directs, qui se rapprochent des compostions « à l’ancienne », qui m’ont permis de ne pas être totalement refoulé par cette nouvelle direction, et bien m’en a pris. Les titres Eclipse et surtout Fragments sont ceux qui m’ont fait de suite écho, deux titres plus direct, plus « franc », et qui se rapprochent des compostions antérieurs du groupe. Ils me permettent de raccrocher les deux parties de carrière. Avec le recul c’est le titre Omni qui signe certainement la meilleure des transitions, avec ces deux parties bien distinctes, l’avant et l’après en somme.


Halo propose une sorte de post-metal, limite post-hardcore également, assez nouveau de leur part. Abyss conclut superbement cet album toujours porté de main de maître par Julien Rufié qui, grâce à un jeu de batterie extrêmement varié, soutient toutes les variantes des compostions, il est clairement le fil rouge de cette galette. Franck Quintin et Yann Servanin, aux guitares savent se faire aussi discrets qu’efficaces. Ils placent, pour mon plus grand plaisir, des riffs syncopés totalement subjuguants pour toute personne qui, un jour, a voulu plaquer trois accords sur une guitare. Quant à Mickael André, il est la clé de voûte qui permet la cohérence à des compositions qui, de prime abord, ne le sont pas toujours.

Au fil des écoutes, je sens que cet album est en train de me happer mais je fais encore de la résistance psychologique car je n’attendais pas cela de la part des Toulousains. Une fois, ma « déception » totalement digérée, je me laisserai certainement transporter par cet album qui a des qualités indéniables pour qui accepte le voyage. Une simple question d’espace et de temps…


Tracklist de Abandon Of The Self :    
   
01. Astral
02. Stellar
03. Omni
04. Eclipse
05. Halo
06. Fragment
07. Abyss