Black Sabbath



Artiste/Groupe

Black Sabbath

CD

Paranoïd

Date de sortie

1970

Style

Heavy Métal

Chroniqueur

Jojo

Site Officiel Artiste

Myspace Artiste

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C H R O N I Q U E

 

1970.

Nous voilà au coeur de la métamorphose du monde de la musique. Alors que le hard rock se propage comme une traînée de poudre dans le monde, avec en figure de proue Led Zeppelin et Deep Purple, Black Sabbath va se former (à Birmingham, Angleterre pour les curieux), composé d'Ozzy Osbourne au chant (le gwand, le tewwible Oz !), Geezer Butler à la basse, Bill Ward aux fûts et Tommy Iommi à la guitare. Les quatre lascars vont apporter une essence nouvelle à la musique. Là où Deep Purple et Led Zep ont opté pour le côté sex, drug & rock 'n' roll que tout le monde connait, Black Sabbath choisit le dépressif et le macabre: c'est l'apparition du métal.

Après un premier album fort convaincant, Black Sabbath va lâcher sur le monde une bombe atomique répondant au doux nom de Paranoïd.

 

L'album s'ouvre sur War Pigs. Pour l'anecdote, War Pigs devait être le nom de l'album, mais la maison de disque a choisi Paranoïd car elle trouvait War Pigs trop polémique, ce qui explique l'absence de lien entre le nom de l'album et l'artwork (montrant un guerrier avec un sabre sortir du néant). Inutile de préciser qu'Ozzy avait bien les boules. Toujours est-il que cette chanson dispose, et c'est là aussi une nouveauté musicale, d'une structure très complexe. Après une intro lourde et prenante où Iommi (guitare) et Butler (basse) s'en donnent à coeur joie, le rythme redescend et la voix d'Ozzy se fait entendre, complètement désincarnée, planante et terrifiante (mais en même temps parfaitement claire). Ozzy y dénonce la guerre du Vietnam, et l'absurdité de la guerre en général (« Politicians have themselves a way/They only started the war/Why shall they go out to fight ? »Butler s'éclate, jamais un son de basse n'avait autant été mis en avant (presque aussi audible que la guitare). Les soli sont très rapides et le final éblouissant de mélodie.  Et la machine Black Sabbath est mise en route: musique lourde, lente mais qui paradoxalement se veut très rythmée, portée par un Ozzy Osbourne au chant très macabre (qui d'ailleurs changera sur les albums suivants).

 

Il serait cependant réducteur de se limiter à ce titre d'ouverture qui, même s'il est excellent, ne suffit pas pour décrire ce chef d'oeuvre qu'est Paranoïd. Car en effet, Black Sabbath jongle avec les ambiances comme personne ne l'avait fait auparavant. Tantôt l'ambiance est électrique, avec des riffs sur lesquels on se surprend à hocher la tête "gaiement" (Paranoïd, Iron Man), tantôt, l'ambiance est lente et mélodieuse (War Pigs, Fairies Wear Boots), voire carrément doomesque (Electric Funeral, Hand of Doom). Les thèmes y jouent un rôle important: Ozzy nous parle de la guerre (War Pigs), de la bombe atomique (Hand of Doom, Electric Funeral) et de la folie (Paranoïd). Seules quelques envolées lyriques sur un super-héros, revisité façon « méchant » (Iron Man), et sur un trip qu'a fait Ozzy lorsqu'il était défoncé au crack (Fairies Wear Boots), permettront à l'auditeur de s'évader de ce monde de brume dans lequel nous plonge Paranoïd

 

Mais là aussi, je n'aimerais pas limiter cet album à de simples ambiances, sinon autant rester sur du doom façon Cathedral (attention je n'ai rien contre Cathedral). Non, Black Sabbath fait preuve d'une technique impressionnante. Les musiciens sont parfaitement en accord, les soli sont monstrueux, que ce soit à la guitare (non mais écoutez-moi ce solo sur Iron Man !!!), à la basse (Hand of Doom) ou à la batterie (War Pigs notamment). Nos trois compères vont d'ailleurs s'allier dans un morceau instrumental, où chacun va à son tour s'illustrer et prouver -mais était-il encore nécessaire de le faire- que leur technique est irréprochable et y est pour beaucoup dans le succès de cet album qui aura tout de même été plusieurs fois disque de platine (!).

Paranoïd offre un véritable panel de rythmes différents et propose de ce fait des structures complexes, comme sur War Pigs et Hand of doom. Le solo de Ward dans Rat Salad est complètement déstructuré mais impressionnant de technique.

 

Black Sabbath est donc un monstre de technique et d'écriture musicale. Les quatre zicos, forts de ces atouts, nous pondent donc des riffs sortis d'un autre monde, qui laisseront sans voix le plus grand nombre d'entre vous. Qui n'a jamais fredonné Iron Man ? Qui n'a jamais fait de « air guitar » sur Paranoïd ? Qui n'a jamais chanté Electric Funeral ? Les riffs sont géniaux, les mélodies superbes et le tout s'enchaîne de manière incroyable, sans temps mort ni lassitude (pas de « ça finit dans longtemps ? »). Tout est parfaitement maitrisé. C'est jouissif d'arrogance.

« C'est bien beau de blablater pendant trois heures, mais y'a bien un petit défaut, nan ? » me direz-vous. Eh bien honnêtement je n'en vois pas. Ah, si. En réalité, la seule (petite) tâche à cet album est sa durée, qui selon moi est trop courte. Du haut de ses huit titres et sa quarantaine de minutes, Paranoïd se finit (trop) vite. Le temps d'écrire cette chronique qu'il est déjà passé trois fois. C'est là le seul point noir de Paranoïd. Mais on peut tout de même profiter de cette courte durée pour enchaîner sur l'album suivant, Master of Reality, qui est moins dynamique mais pas plus mauvais...

J'ai insisté sur l'ambiance de cet album. J'ai insisté sur le niveau technique des musiciens. J'ai insisté sur la qualité des riffs. Mais j'aurais beau continuer en utilisant toute les mots imaginables, Paranoïd se vit plus qu'il ne se décrit.

Paranoïd c'est lent. Paranoïd c'est rapide. Paranoïd c'est calme. Paranoïd c'est dynamique. Paranoïd c'est des soli magistraux. Paranoïd c'est des riffs exceptionnels. Paranoïd c'est beau. Paranoïd c'est du doom. Paranoïd c'est du heavy metal. Paranoïd c'est du blues. Paranoïd, c'est tout, sauf un mauvais album.

Avec cet album, Black Sabbath s'ouvre les voies du succès, et s'inscrit au Panthéon du rock comme un groupe de heavy metal inégalable. Black Sabbath a tout simplement inventé le métal, bien avant la NWOBHM des années 80...