Groupe:

Helloween + Rage

Date:

28 Avril 2016

Lieu:

Paris

Chroniqueur:

Blaster Of Muppets

Il y a (au moins) deux certitudes au sujet d'Helloween. Quand une tournée se prépare, on sait que Paris ne sera pas oubliée. La popularité des citrouilles est telle chez nous qu'il ne convient pas de se demander si un concert aura lieu... la seule question est "quand aura-t-il lieu ?". Deuxième certitude : on sait que les chances de passer un très bon moment sont plus que grandes. Le savoir-faire des Teutons, l'ambiance particulièrement festive de leurs concerts (l'état d'esprit des fans du groupe joue un rôle très important, évidemment) et le fait que les setlists soient régulièrement remaniées et proposent toujours une petite poignée de surprises font qu'il n'y a pas vraiment lieu de s'inquiéter quant à la qualité de la soirée. Tout cela aurait dû se vérifier en février dernier au Bataclan... mais en raison des attentats du 13 novembre 2015, cela n'a pas pu se faire. Heureusement, pas d'annulation en vue, juste un report. Et c'est dans la magnifique salle du Trianon en ce 28 avril que les fans français d'Helloween ont pu venir passer une soirée aussi heavy que fun.

Un petit changement par rapport à la date initialement prévue : les Anglais de C.O.P. UK ne font plus partie de l'affiche. Par contre, il y a un groupe qui n'a pas disparu et je m'en réjouis : c'est Rage ! J'attendais le retour de ce trio - remanié, car l'inoxydable Peavy Wagner s'est entouré de deux nouveaux complices : Marcos Rodriguez (guitare) et Vassilios Manatopoulos (batterie) - avec une certaine impatience... Car oui, il fut un temps où l'on pouvait quasiment autant compter sur les passages de Rage dans notre capitale que sur ceux d'Helloween. Mais après la tournée pour l'album Carved In Stone, qui remonte quand même à 2008, plus rien... Et ça m'a manqué ! A tel point d'ailleurs que ce soir, je me suis plus déplacé pour voir Rage qu'Helloween (que j'aime tout de même beaucoup mais qui s'est fait moins rare ces dernières années). 

Des souvenirs de concerts de Rage, j'en ai quelques-uns. Ils sont tous bons. Jamais ce groupe ne m'a déçu sur scène, peu importe la qualité de l'album proposé pour l'occasion. Je me demandais ce qu'allait donner le cru 2016 avec son nouveau line-up... sans réelle inquiétude. Le trio a attaqué son set avec deux morceaux que les fans connaissent bien : Black In Mind et Sent By The Devil, tous deux extraits de l'excellent album Black In Mind sorti en 1995. Le constat est immédiat. Le groupe est heureux d'être là et le public également. Dès la fin de Black In Mind, c'est l'ovation... digne de celle qu'un groupe de tête d'affiche peut recevoir lors de son entrée sur scène. Sur Sent By The Devil, les fans tapent des mains sur le break. Le trio affiche sourires et grande décontraction... et, bien sûr, la qualité de la prestation est irréprochable. Les deux chansons bien directes choisies pour démarrer le set font mouche et n'ont aucune peine à conquérir une foule bien disposée. 

On reste dans les années 90 mais on change d'album avec la chanson End Of All Days (tirée du disque du même nom), aussi entraînante que les précédentes mais plus mélodique et catchy. Imparable. Un petit ralentissement de tempo s'impose avec Back In Time (extraite de Ghosts) qui sera la seule représentante de l'ère plus mélodique et symphonique du groupe. Quel morceau ! Le rendu est impeccable car le son est de bonne facture et les musiciens excellents. On peut d'ailleurs prendre la pleine mesure de l'enthousiasme des deux "petits nouveaux" qui semblent s'éclater et savourer chaque seconde du set. Ils participent aussi beaucoup aux choeurs... le groupe est soudé et très performant, ça saute aux yeux et aux oreilles ! 

Après un début de concert consacré à la deuxième moitié des nineties, Rage change de millénaire et balance une compo de l'album Unity, la puissante Down et son gros riff de bûcheron. Ceux qui avaient peur que Marcos ne fasse pas honneur aux parties de guitare virtuoses de son précédesseur ont dû être rassurés tant il a démontré qu'il était parfaitement à l'aise dans les chaussures de Smolski. Mais Mr. Rodriguez n'est pas qu'un excellent guitariste (ce qui est déjà pas mal, convenons-en), c'est aussi musicien qui a une sacrée présence sur scène... et le gars a l'air de vraiment s'amuser, ça fait plaisir à voir. Et il n'est pas le seul. Lorsque le groupe balance son nouveau single, My Way, et que celui-ci reçoit un accueil très chaleureux, on voit bien que Peavy est aux anges. Sur le titre suivant, Until I Die, un brûlot speed qui nous fait revenir à l'époque Black In Mind, Marcos joue avec le public pendant le solo de guitare et nous offre, avec Peavy, une sorte de fin Manowaresque, lorsque tous deux croisent les manches de leurs instruments. 

Le set durera une petite cinquantaine de minutes environ avec, pour finir, un classique des débuts (la seule chanson rescapée des années 80), j'ai nommé l'ébouriffante Don't Fear The Winter, véritable hymne speed metal comme on n'en fait plus beaucoup aujourd'hui... ainsi qu'un autre hymne qui a souvent clôturé les prestations du trio : le fameux Higher Than The Sky (idéal pour faire chanter le public) qui, ce soir, sera introduit par un beau "Paris, je t'aime" lancé par un Peavy toujours visiblement ravi et rallongé avec un petit passage de Sweet Home Alabama (Lynyrd Skynyrd) et un autre de Holy Diver (Dio) sur lequel Marcos prendra le micro et se livrera à une imitation assez bluffante du grand Ronnie James Dio. Fun et excellent. 

Après un tel final et une prestation enjouée et aussi bien reçue, on en redemande. Les cinquante minutes sont passées trop vite. Messieurs, s'il vous plaît, quand The Devil Strikes Again sera sorti, il faudra revenir nous voir... sans faute !!  

Setlist Rage :

01. Black In Mind
02. Sent By The Devil
03. End Of All Days
04. Back In Time
05. Down
06. My Way
07. Until I Die
08. Don't Fear The Winter
09. Higher Than The Sky 

 

Une petite pause histoire de se remettre les idées en place et voilà qu'il est déjà l'heure d'accueillir les célèbres Hambourgeois d'Helloween. C'est l'intro Walls Of Jericho qui résonne dans le Trianon pendant que l'on découvre un beau backdrop qui reprend la pochette du dernier album (My God-Given Right) ainsi qu'une grosse tête de citrouille/statue de la liberté gelée et gonflable (toujours la fameuse illustration du dernier opus) placée au fond à gauche de la scène. Dès les premières notes de l'intro sus-citée, c'est le délire dans la salle... et ce ne sont certainement les deux premières chansons choisies pour démarrer le set qui vont faire retomber l'ambiance puisque le cultissime Keeper Of The Seven Keys Part II est à l'honneur avec la légendaire Eagle Fly Free et le hit single fun Dr. Stein. Mais contrairement à ce que l'on pourrait penser avec un tel début de concert résolument ancré en 1988, Helloween n'est pas venu pour nous offrir un grand moment de nostalgie. Les très vieilles chansons (celles des albums sortis entre 1985 et 1993) seront en fait assez rares... Et d'ailleurs, en troisième position, c'est la récente My God-Given Right qui est offerte en pâture aux fans qui chantent le thème principal à pleine voix... et déjà, Andi Deris, toujours en forme, en profite pour jouer avec la salle et faire chanter le public sur le break. Voilà un début de concert plutôt enthousiasmant. 

Comme je le disais en introduction, le savoir-faire des Teutons enjoués n'est plus à démontrer. Enfin, quand je dis "enjoués", je pense surtout à Andi Deris, l'archétype du frontman jovial, à Markus Grosskopf, bassiste qui passe la moitié du concert à tirer la langue, et à la rigueur de Dani Löble qui se défonce sans compter sur sa batterie. Parce qu'au niveau des guitaristes, c'est quand même moins ça. Sascha Gerstner a toujours un jeu impeccable mais également cet air un peu absent, voire limite dépressif qui le caractérise... Je ne sais pas, j'ai toujours trouvé que le monsieur avait des yeux tristes. Passons vite, je pense que mon analyse du regard de Gerstner vous passionne à peu près autant que mon avis sur l'avancée des travaux sur la ligne A du RER. Et il y a évidemment un autre guitariste, que dis-je, LE guitariste qui est là depuis les débuts du groupe : Michael Weikath. Ce monsieur a toujours été très "décalé", aussi bien sur scène qu'en interview... Ce soir, avec ses nombreux kilos perdus, il me fait presque peur. J'espère qu'il n'est pas en mauvaise santé. En tout cas, les clopes à tout va pendant le concert, ça a l'air d'être terminé... Ouais, j'ai plein de trucs passionnants comme ça à vous raconter... Attendez !!! Restez... Un dernier mot sur Weikath... il a l'air de s'emmerder au plus haut point. Trop de nonchalance tue la nonchalance. Mais franchement, je suis quasiment certain que c'est un air qu'il se donne, que ça fait partie du show... ça reste quand même un peu spécial. C'est Weikath, quoi...

Revenons-en à la musique, ça vaut mieux. Ce que j'aime chez ce groupe, c'est qu'il nous déterre toujours deux ou trois morceaux auxquels on ne s'attendait pas (sauf quand on triché et qu'on est allé voir les setlists de la tournée sur internet, hein... vous vous reconnaissez ?). Ce soir, un album est un peu plus mis en valeur que les autres... eh non, il ne s'agit ni du dernier en date ni d'un classique des années 80. C'est en fait The Time Of The Oath qui se voit représenté par quatre titres disséminés tout au long du set : Steel Tormentor (en quatrième position ce soir), impeccable, le single Power et la ballade Forever And One (encore un single...), déjà moins surprenants, joués peu avant le rappel ; et surtout, le morceau qui m'a le plus réjoui : le speed et ravageur Before The War (proposé en début de rappel) qui, sauf erreur de ma part, avait disparu des setlists d'Helloween depuis près de vingt ans !  

Moins surprenant en revanche, comme à leur habitude, les citrouilles d'Hambourg nous servent énormément de singles. Ce qui ne veut pas dire que les chansons choisies sont mauvaises ou manquent de peps car ces messieurs ont parfois le bon goût de faire la promo d'un album en mettant en avant des titres assez bastonnants, mais quand même... c'est une constante, les compos non "singlelisées" sont beaucoup plus rares que les autres. Voyez plutôt : Dr Stein, single. My God-Given Right... single. Mr. Torture (excellente, j'ai été ravi de la retrouver, celle-là), single. Where The Rain Grows (yes, géniale), PowerForever And One : single, single, single. Et le rappel, il s'est terminé avec quoi ? Avec Future World et I Want Out... des singles. Même dans le medley de treize minutes assez sympa, le groupe a réussi à caser des bouts de singles (Sole SurvivorI Can et Are You Metal?). Bon, j'arrête, je pense que vous avez compris. Helloween aime ses singles, le public n'a pas l'air malheureux, certaines de ces chansons font vraiment plaisir à entendre (aaahhh... Sole Survivor, même écourtée au sein d'un medley, quel bonheur !), mais moi qui ne suis jamais content, j'aimerais aussi entendre d'autres chansons plus rares, moins "populaires".

Laissons un peu de côté ces considérations setlistiques. Le groupe déroule son show en grand professionnel. Deris joue sans cesse avec le public. Il a toujours été un bon frontman, ce n'est pas aujourd'hui qu'il a l'intention de démériter. On l'a connu un brin plus bavard ou "rigolo", mais c'est très bien comme ça... je préfère que le groupe propose un enchaînement bien rythmé de compos efficaces. Le dernier album sera rappelé à notre souvenir avec la heavy Heroes (au refrain taillé pour la scène) et la très mélodique Lost In America. En parlant de compos mélodiques (enfin plus mélodiques que les autres, Helloween ne fait pas dans le metal extrême), on aura aussi le droit à la sympathique Waiting For The Thunder et à la plus dispensable (avis personnel) Straight Out Of Hell extraite de l'album du même nom. Vers le milieu du show, juste après Heroes, c'est l'heure du solo de batterie. Passage obligé de beaucoup de concerts de groupe de metal, celui de Dani Löble fait vraiment partie de ceux dont je pourrais me passer. Ok, le gars tape vite et fort (il grimace beaucoup aussi) mais je m'ennuie. Quatre minutes de roulements dans tous les sens, dépourvues de fun ou d'inventivité, c'est long... Heureusement que juste après, c'est Where The Rain Grows qui est venue rattraper le coup. 

J'ai bien aimé le medley démarrant avec Halloween, s'achevant avec Keeper Of The Seven Keys (chaque musicien saluant la foule et quittant la scène l'un après l'autre sur l'outro à la guitare) et comprenant les trois petits bouts de singles mentionnés plus haut. Voir la foule s'activer sur des morceaux remuants comme Before The War (certains y sont allés de leur petit pogo), c'était sympa aussi... Mais pas aussi drôle que voir Andi Deris s'attraper les parties à plusieurs reprises au moment de chanter "We have the guts to follow the sign" sur Power. Il doit confondre "guts" avec "balls"... Un concert d'Helloween, c'est aussi l'occasion de s'interroger sur la qualité des cours de SVT (ou d'anglais) en Allemagne, finalement. Je sais, c'est un peu de la mauvaise foi... mais j'ai le droit, c'est MON live report. En tout cas, le chanteur interprète toujours aussi bien ses compos sur scène, un peu moins bien celles chantées à l'origine par Kiske (il y a notamment trop d'écho sur sa voix parfois, comme pour masquer d'éventuelles difficultés, sur Future World par exemple) mais dans l'ensemble, le niveau est plus qu'honorable. Comme celui de tous les musiciens, de toute façon. 

Malgré les qualités d'interprétation, le fun, la générosité du groupe... Il m'a quand même manqué un petit quelque chose. Un brin de spontanéité ou de folie supplémentaire, peut-être... Tout cela fut très pro mais sans doute un chouia téléphoné par moment. Ou alors, ça vient de moi. Ce n'est pas impossible... j'ai beaucoup vu Helloween sur scène depuis plus de vingt ans... Peut-être que je les connais trop. Et puis, les derniers albums m'ont moins passionné... ça peut venir de là. Il y a aussi Rage qui m'a fait très forte impression en début de soirée... Peu importe, Helloween n'a pas démérité. Le concert fut carré, les fans visiblement ravis et le groupe demeure une valeur sûre du genre. On peut toujours pinailler, le principal est tout de même là, il me semble. 

Bilan très positif : encore une belle soirée metal au sein de notre capitale. Un grand merci à Base Productions pour l'accréditation. 

Setlist Helloween :

01. Eagly Fly Free
02. Dr. Stein
03. My God-Given Right
04. Steel Tormentor
05. Mr. Torture
06. Waiting For The Thunder
07. Straight Out Of Hell
08. Heroes
09. Drum solo
10. Where The Rain Grows
11. Lost In America
12. Power
13. Forever And One
14. Medley : Halloween / Sole Survivor / I Can / Are You Metal? / Keeper Of The Seven Keys
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15. Before The War
16. Guitar solo
17. Future World
18. I Want Out