Pin-Up Went Down

Interview date

13 Juillet 2010

Interviewer

Ostianne

I N T E R V I E W

Interview Alexis Damien (par téléphone)


Vous aviez frappé fort avec votre premier album. Le public semble attendre beaucoup de vous. Cela a-t-il joué sur votre travail pour ce deuxième opus ?

Oui. En fait, on a un petit groupe de fans assez solide, pas énormément, mais ils nous suivent, nous envoient des messages. Ils attendent des choses. On a essayé de bien faire effectivement.

Vous-êtes vous servis des critiques du premier album "2 Unlimited" pour "342" ou les avez-vous mises de côté pour vous concentrer uniquement que ce que vous, vous souhaitiez faire ?

Sur le premier, il y avait des côtés un peu électro qu'on n'a pas du tout voulu refaire sur le deuxième. C'était un choix. Sur "342", ce sont des instruments acoustiques, tout est acoustique et ça sonne vraiment organique. C'était vraiment un choix de production. Donc, ça c'est par rapport aux critiques de son. Après, dans les compositions, on a aussi essayé de faire des petits morceaux assez simples. Parce que parfois, on nous avait dit que c'était un petit peu trop barré, que ça partait à droite et à gauche. Et sur le deuxième, tu as des morceaux comme "Escargot" qui est tout simple, "Porcelain Hours" qui est tout simple aussi, comme "Home". Le huitième, "Pictures To Speak To" qui est assez simple. Donc on a essayé de faire des choses qui n'étaient pas forcément barrées, parce qu'on nous met cette étiquette là, et ce n'est pas vraiment ce que l'on est. Je pense que c'est une fausse étiquette, pas tout à fait vraie.

Et "342", ça signifie quoi ?

En fait, il faut le prononcer en anglais, "three four two" et c'est simplement un jeu de mot pour dire qu'on est trois pour deux (three for two, ndrl). Parce que maintenant il y a mon frère qui nous a rejoint, donc on est trois. Et puis, c'est un chiffre rigolo parce que notre album fait quarante-deux minutes trente. Donc, c'est un peu subliminal, ou complètement débile (rires).

Et sur l'arrière du livret, vous apparaissez tous les trois, chacun d'entre vous ayant l'un de ces chiffres sur la tête. Est-ce que ça a aussi une signification particulière ?

Non, ça n'a pas de signification particulière, c'est juste comme ça.

Asphodel et toi, vous semblez avoir des rôles bien définis dans le groupe. Est-ce que vous mettez quand même votre grain de sel dans le travail de l'un et de l'autre ?

Oui, bien sûr. C'est vrai que moi, je lui laisse toujours carte blanche pour son chant. C'est-à-dire que je lui envoie des démos toutes faites au niveau de la musique, et elle, elle écrit ses textes, elle invente son chant et puis on en discute. Et évidemment, pour moi, c'est pareil, quand je lui envoie une démo qui ne lui plait pas, elle me le dit et je corrige des choses. Et quand elle fait un chant tout pourri, et bien, je le lui dis (rires), parce que ça lui arrive aussi.

Niveau géographie, vous êtes un peu à l'opposé. Comment on arrive à avoir une vie de groupe dans un tel cas de figure ?

En fait, on fait tout par internet parce qu'effectivement on habite très loin. Donc, je lui envoie des MP3 et puis, elle, elle fait pareil. Et puis pour enregistrer le disque, elle a enregistré dans un studio à Lyon, et moi j'ai enregistré chez moi. Et mon frère aussi habite dans le sud, donc on est vraiment un trio éloigné.

On sent une vraie recherche musicale dans vos albums. Comment tu fais pour allier tous ces éléments ?

C'est un peu un défi que je me suis fixé. A chaque morceau, je voulais proposer quelque chose de différent de ce qu'on a pu faire. C'est-à-dire par exemple que le rythme de batterie est différent pour chaque morceau, les harmonies sont différentes, il y a une ambiance différente. On essaye de proposer une histoire un peu inédite. Après, techniquement, comment on fait ? On compare. Par exemple, le premier morceau qui ouvre l'album, "Diapositive", est-ce qu'on a fait un titre comme ça sur le premier ? Pas vraiment, le côté jazzy du début, on ne l'avait pas sur le premier. Donc évidemment, au bout d'un moment, on risquera de faire autre chose. Je pense que le troisième album sera peut-être plus homogène, ou plus différent. Là, on est peut-être allé assez loin dans le patchwork.

Oui, parce qu'on passe à des passages où l'on entend quelque chose de religieux, puis quelque chose qui relève plus de l'ethnique avec un côté africain, le côté jazzy aussi dont tu parlais, c'est une palette étendue...

Oui, mais nous, ça nous éclate. En tant que musiciens, ça nous fait progresser. Les idées peuvent venir de n'importe quoi. C'est-à-dire que tu travailles ta guitare et il y a une idée qui surgit et on va utiliser. On le prend comme ça. C'est vrai qu'on ne se fixe pas de limites, il y a une certaine variété. Effectivement, pour les gens qui attendraient un metal très rigoureux et très stylisé, ils risquent effectivement d'être déçus par Pin-Up. Et puis, il peut y avoir des gens qui aiment le rock, le metal et puis des choses un peu plus alternatives, là, peut-être qu'ils trouveront plus leur compte. D'ailleurs, au fur et à mesure des albums, même si ce n'est que le deuxième (rires), il y a des personnes qui étaient très extrêmes dans leurs goûts. Ces gens là, risques d'être déçus, ce n'est peut-être pas le genre de groupe qu'il leur faut. En revanche, les gens qui aiment un peu plus l'alternatif apprécient ce mélange là.

Et je suppose que vos goûts musicaux sont aussi variés que ce que l'on entend sur l'album.

Effectivement. Ce qu'il se passe, c'est qu'on est tous les trois très différents. Moi, j'écoute pas mal de metal, mais aussi de par ma profession, je fais aussi d'autres choses, par exemple du jazz-rock. C'est quelque chose que l'on peut entendre à la fin de "Murphy In The Sky With Daemons", il y a tout un passage un peu jazz-rock à la fin. Là, c'est mon influence. Mon frère est plus classique. On peut l'entendre au début de "Khabod Of My Aba", le passage religieux dont tu parlais, ça c'est Nicolas et Asphodel. Mon frère a écrit tout l'orga, l'harmonie et par-dessus, Asphodel a fait son chant. Asphodel écoute énormément de metal et elle connaît plein de choses, et elle écoute aussi plein de vieux trucs, des chanteurs des années quarante. Elle écoute aussi beaucoup de groupes alternatifs. Donc, effectivement, on a chacun notre identité et c'est peut-être ça qui fait le caractère du groupe.

Tu parlais de Nicolas, lui aussi a finalement participé à la composition ?

Oui, bien sûr. Lui et moi, on est tout le temps en contact, on s'échange les MP3. Moi, j'ai vraiment le rôle d'ouvrier principal parce que c'est moi qui gère le produit fini etc. Après, il y a des choses qu'il a fait tout seul. Par exemple, le morceau "Home", c'est vraiment mon frère qui l'a composé tout seul. Pareil pour le début "Khabod Of My Aba". Et puis pour "Pictures To Speak To", il y a un vrai travail de duo, on a vraiment composé tous les deux ce morceau là. En fait, ça dépend de chaque titre, il y a des choses que j'ai fait tout seul, "Diapositive" par exemple.

Avec votre univers assez particulier, est-ce que vous pensiez toucher autant de monde avec le premier album ?

Nous on n'attendait rien. On a sorti ce premier disque et on se demandait ce qui allait se passer. En fait, comme on a la chance d'avoir un label, on est écoutable dans plusieurs pays. A petit échelle, mais dans plusieurs pays et c'est vrai que c'est assez agréable. Tu peux avoir un Brésilien qui aime ta musique et qui t'écrit un petit mot. Et puis ça, ça nous a vachement encouragé à continuer parce que de toute façon, on ne sera jamais vraiment assez connu pour devenir un groupe rentable. Pour nous, ce n'est pas notre gagne pain et c'est vraiment une passion. Donc, on a vraiment besoin de ce retour du public. Et donc oui, on est toujours surpris que des gens nous écrivent, mais je ne peux pas te dire les proportions, parce qu'en fait, pour les gens, le groupe n'a que deux ans. Mais on va essayer de continuer de faire de bons albums et on pourra se donner rendez-vous dans cinq ans pour voir à quel point le public accroche, parce que c'est ça ta question, mais c'est difficile d'y répondre.

Est-ce que tu penses que si vous étiez plus que vous ne l'êtes à présent dans le groupe, vous auriez autant de liberté d'expression ?

En fait, je pense que c'est l'argent qui fait que tu es libre ou pas. Tu prends System Of A Down, c'est un groupe qui a du gagner beaucoup d'argent et forcément, ils sont restés dans leur style, qui est déjà pas mal ouvert quand même, mais ils ont conservé cette pâte de composition là. Tu prends AC/DC, c'est pareil, c'est un groupe super star, ils ne vont absolument pas prendre de risques. Donc effectivement, quand tu es un petit groupe indépendant sur un petit label, tu peux te permettre de faire tout ça. Donc, c'est une chance quelque part.

J'ai vu que c'était toi qui avais mixé et produit l'album. Tu penses qu'on est mieux servis par soi-même ou c'est plutôt une histoire de moyen ?

J'ai la chance d'avoir un home-studio chez moi. C'est aussi une passion pour moi, ça fait un peu partie de ma profession. Faire un album de Pin-Up dans un vrai, gros studio, ça coûterait cher parce que ça prend du temps. Et comme chaque morceau est différent, on ne peut pas tout mixer sur un même projet. On ferait du thrash avec la même orchestration tout le temps, ça serait plus simple, parce qu'on pourrait peut-être enregistrer en quatre jours. Là, ce n'est pas possible et ça reviendrait trop cher. Donc effectivement, je fais ça dans mon home-studio. Donc, effectivement, moi je progresse d'années en années, la prochaine fois, j'aurais peut-être plus de matériel. Donc le fond sera encore différent.

J'ai vu que c'était toi qui t'étais occupé de tous les instruments pour l'enregistrement. Comment ça s'est passé ? Y en a-t-il un que tu enregistrais toujours en premier ou ça dépendait du morceau ?

D'abord je fais des sortes de maquette. J'ai enregistré la batterie en premier, ensuite basse, guitare, et les claviers, je les ai laissés comme sur la démo. Ils étaient finalisés dès le départ. Et puis en dernier le chant.

J'ai vu que ta formation première, c'était d'être batteur, si je ne me trompe pas, tu es même prof de batterie. Comment en es-tu arrivé à jouer de tous les instruments ?

La basse, j'en fais depuis que je suis ado, donc ça fait très longtemps. En fait, quand tu es batteur, c'est bien de jouer d'un autre instrument qui n'est pas que rythmique, et pour l'oreille c'est bien de ne pas faire que de la batterie, mais de la basse, de la guitare etc. Le clavier, j'en ai fait pour mes études musicales, mais je ne suis pas très fort en clavier. Mais je peux composer des petites choses. Sur l'album, il y a des petites choses au celesta, j'en ai fait quelques parties. A la fin de "Murphy In The Sky With Deamons", il y a un clavier numérique, je l'ai fait. Mais dès qu'il s'agit de faire des belles choses au piano, mon frère est plus compétent. La guitare, je m'y suis mis il n'y a pas très longtemps. C'était un petit défi parce que, quand on aime le rock, on a forcément envie de faire de la guitare.

On voit qu'Asphodel est capable de faire à peu près tout avec sa voix. Est-ce que ça t'aide par rapport à la composition dans le sens où tu te dis que tu peux faire ce que tu veux et qu'elle arrivera sûrement à suivre avec le chant ?

Ah oui, carrément ! En fait, je ne me pose même pas la question, je sais qu'elle trouvera un truc et puis elle se débrouille. (Rires). C'est un défi. Je ne me pose pas de questions. Après, je ne sais pas si elle est capable de tout faire, mais elle a différents timbres de voix, que ça soit dans les graves ou dans les aigus. Dans "Pictures To Speak To", au début, elle imite une vieille femme, ça on le comprend quand on lit le texte. Et là, effectivement, elle a une voix assez grave et elle ne nous l'avait pas fait sur le premier. C'était sympa d'avoir ça pour "342".

Et quand elle t'a parlé du design, notamment les dessins à l'intérieur, quelle a été ta première réaction ? Tu as tout de suite approuvé ou tu as émis quelques réserves ?

Au départ, j'ai été surpris, c'était la première fois que je voyais un truc comme ça. C'est vrai que tout est fait à la main, donc c'est un peu particulier. Mais maintenant, j'aime beaucoup. Je trouve que ça donne un caractère encore plus personnel à la chose. C'est vrai qu'après on peut faire des design un peu comme sur le premier, comme sur le dernier Deftones par exemple, sur la pochette, il y a une photo. C'est vrai que c'est assez facile de faire ça, une belle photo professionnelle avec un beau logo et une belle police, ça fait tout de suite dans l'air du temps etc. Mais c'est peut-être un peu moins personnel, donc c'est ce qu'elle a voulu exprimer je pense.

Sur le premier livret, il n'y avait pas les paroles, cette fois-ci, elles y sont. Pourquoi ?

Je pense que c'est tout simple. Pour le premier album, il n'y avait pas assez de place, il n'y avait que quatre pages dedans. Donc, c'était un peu short. Là, avec douze pages, il y a la place.

Quels sont les meilleurs souvenirs que tu as du travail effectué sur cet album ?

(Hésitant). C'est difficile de répondre à ça. Il y a quelques invités sur le CD. Il y a des copains qui sont venus faire des choses. J'ai notamment un copain qui s'appelle Romain et qui m'a aidé à faire des choses aux claviers. Là c'est vrai que ce sont de bons moments de partage. Sinon, ce qui est plus sympa, c'est quand on s'envoie les fichiers et qu'on attend la réaction des autres. Quand les autres sont très enthousiastes, ça c'est vachement chouette. Sinon, quand tu as fait une bonne prise. Pour l'occasion, on m'avait prêté une basse, et donc pour la première fois de ma vie, j'ai eu l'occasion de jouer avec une basse comme celle-là et il y avait un son tellement sympa que ça donnait envie de jouer. Ce sont des sensations avec le matériel, des choses comme ça qui sont vraiment agréables.

Vous allez prendre la route pour présenter ce nouvel album ?

Pour l'instant, on ne l'a pas prévu. C'est-à-dire qu'on va rester un projet studio pour le moment et puis, peut-être un jour on fera un concert. On en a fait un en septembre dernier, c'était au H'elles On Stage. Je pense qu'on sera assez rare sur scène pour le moment.

C'est étonnant car souvent, les musiciens disent que leur musique prend tout son sens une fois sur scène.

Oui, c'est vrai. Mais c'est compliqué pour plein de raisons, et puis on habite loin. Si vraiment un jour, on voulait être très près sur scène, vraiment tout péter, il faudrait répéter parce qu'on ne peut pas tout improviser sur scène. C'est assez compliqué, donc pour le moment, on préfère avoir quelques fans avec nos CDs et puis un jour, peut-être...

A part Pin-Up Went Down, tu as d'autres projets ?

Oui. Je vais peut-être faire la batterie sur le prochain Orenda, un groupe de metal progressif. J'ai fait la batterie sur un groupe qui s'appelle Super Scream qui cherche un label. Et puis, j'ai un groupe de jazz-rock qui s'appelle Badjada et puis je fais des plans en tant que musicien que je ne vais pas citer car ça n'intéressera sûrement pas les gens.

Pour toi, quelle serait la meilleure façon de conclure cette interview ?

Je voudrais remercier le webzine, te remercier toi et puis tous les lecteurs qui auront ouvert la page de l'interview. Leur dire que les gens sont vraiment importants pour nous, car les seuls retours que l'on a viennent d'eux. Leur dire qu'ils n'hésitent pas à nous envoyer des messages, que ça soit sur facebook, myspace, tous les sites de partage. Leur dire qu'il faut soutenir les groupes français, notamment nous puisqu'on prend des risques pour faire avancer les choses. Et puis qu'ils n'hésitent pas à acheter le CD. Actuellement, sur Season Of Mist qui est le distributeur français, le premier album est à six euros, donc, au lieu d'aller manger un mcdo, ils peuvent se payer "2 Unlimited" (rires). Et puis, sur le site du label, le dernier album n'est pas très cher, donc il faut nous soutenir.