Headcharger

Interview date

19 Février 2011

Interviewer

philippec et Jojo

I N T E R V I E W

Interview Sébastien, Antony, Romain (face à face)


Bonjour à vous. Avant même d'en venir au concert, parlons d'Headcharger. Comment s'est formé le groupe, quand, et autour de qui ?

Sébastien Pierre : Bonjour, alors Headcharger est né des cendres d’un groupe qui s’appelait Doogystyle qui était plus dans le registre hardcore metal cela durait environ cinq ans, on avait fait pas mal de dates et surtout la deuxième édition du furyFest, l'ancêtre du hellfest actuel. Les deux guitaristes Babz (David Rocha) et Antony (Josse) sont arrivés après le premier album d'Headcharger, à partir de là nous avons décidé sans vraiment le décider de changer de direction musicale, dans le sens où il y a un temps où tu vieillis, je dis ça dans le sens positif du terme, en fait tu deviens un peu plus mature. Puis tu te rends compte que tout ce qui est beat down, etc… tu en as vite fait le tour, du point de vue musical. Du coup il devenait important d’assumer ce que l’on écoutait déjà à l’époque, en fait nous n'écoutions pas que du hardcore, comme la majorité des jeunes on piquait les vieux vinyles de nos ainés ou nos parents. Je te parle des Led Zeppelin, des premiers AC/DC... Des référence quoi ! du coup Headcharger c'est un peu ça, c'est la rencontre entre ce que nos parents écoutaient et ce que nous on faisait. Oui Headcharger c'est ça !

Beaucoup -dont nous faisons partie- voient votre musique comme un subtil mélange de rock et de metal, voire même de hardcore et de stoner. Etes-vous d'accord avec cela ?

Sébastien : Ecoute, moi je suis toujours d'accord avec les étiquettes, si les gens veulent nous en coller qu’ils le fassent. Je crois que cela conforte tout le monde de nous cloisonner dans un style, si les gens le pensent c’est qu'il y a surement une part de vérité. Après on ne s’en tient pas uniquement à ça, si tu interroges chaque membre du groupe sur l'univers musical d'Headcharger, tu auras une réponse différente. Antony te parlera de pop, Babz de rock seventie’s, Rom de hardcore et moi je te parlerai de metal des années 90.

Donc c'est Babz qui vous a inspiré la reprise de Led Zep "Communication Breakdown"?

Sébastien : Qui nous a inspiré non. Mais forcément en tant que fan de Led Zeppelin il en a lancé l'idée, cela faisait un moment que cela le titillait (rires). Mais c’est une adaptation beaucoup plus musclée que l’originale. La reprendre à l'identique était délicat car nous savions que nous n'arrivions pas à l'ongle d’un doigt de pied du talent de ces mecs; donc il fallait qu’on l'adapte à notre sauce, quoi !

Côté discographie, vous avez sorti si je ne m'abuse votre troisième album en 2010, "The End Starts Here". Comment cet album a-t-il été reçu par la critique et par le public ?

Antony : Bien ! Super bien ! Disons que les réactions des professionnels et des critiques ont largement surpassé celles de nos premiers albums, pour celui-ci on a eu aussi une couverture médiatique beaucoup plus large ainsi que de très, très, bonnes chroniques; on a dû en avoir que deux ou trois de mauvaises. Après, au niveau du public, à l'heure actuelle, c'est notre album qui s'est le mieux vendu, surtout il en part beaucoup à la fin de nos concerts et ça c'est bon signe. Si on en vend après nos sets, c’est que l'on a bien fait le job et que l’on a tout donné sur scène.

Sébastien : Et oui ! Dans le sens où notre musique reste du rock au sens large du terme et on la veut taillée pour la scène, c'est le live qui fait notre musique et les albums sont, limite, le prétexte pour partir sur la route.

Donc pour vous Headcharger est un groupe fait pour le live ?

Sébastien : C'est un groupe de rock, pour moi tous les groupes de rock sont fait pour le live, l'album c’est juste un prétexte pour partir sur la route mais bien entendu c'est pas pour autant que l'on s'applique pas sur la production des nos albums.

Antony : A l'heure actuelle, avec l'informatique, il y a tellement de groupes qui sortent des albums over clean, bien joués en studio et tout, puis sur scène ils assurent pas une cacahuète, nous on veut tout sauf ça.

Sébastien : Les moyens informatiques aujourd'hui font que n'importe qui peut faire une production qui tient relativement la route, après cela se passe sur scène, si le mec nous fait un skeud et une prestation live qui tient la route aussi, là ok pour moi, il aura une crédibilité. Babz avait une réflexion l'autre fois et je trouve ça assez juste, il disait que le rock aujourd'hui, enfin surtout le metal, était tellement produit que l’on se rapprochait du hip hop où c'est le producteur qui fait l'album. Et pour résultat, cela te donne des albums super froids, bien entendu chacun écoute ce qu’il veut. Mais pour un groupe de rock dans le sens large du terme, tout se joue sur scène !

Pouvez-vous nous expliquer votre manière d'aborder le travail de compositions au sein du groupe et comment est faite la répartition des taches entre vous (textes, musiques) ?

Antony : On compose tous, aussi bien la musique que les textes. De manière générale, les idées de base viennent de David ou de Romain, et on met tout ça en forme, soit tous ensemble en répétition, soit chacun chez soi devant un ordi ! Ok, ce n’est pas très rock, mais c'est tellement pratique ! Ensuite pour tout ce qui est texte et parties chant, on bosse beaucoup en binôme Seb et moi, mais il n'y a pas de règles, tout le monde participe à toutes les étapes.

Pouvez-vous nous donner la signification du titre "Harvey Keitel's Syndrome"?

Antony : Le texte de "Harvey Keitel's Syndrome" fait écho a un morceau de Watch the Sun qui s'appelait "Bill Murray's Syndrome". C'était le morceau le plus speed du disque, et on trouvait marrant de reprendre le concept pour un morceau acoustique plutôt posé. On est tous de grands fans de cinéma, c'est un truc qui fait partie intégrante de notre culture, au même titre que la musique. On a énormément de références cinématographiques dans nos textes, des citations ou autre. Pour ce texte en particulier, ça fait référence a un personnage du film Smoke, créé par Paul Auster et mis en scène par Wayne Wang. Ceci dit, même si le texte fait des rappels a ce film, le sujet n'a finalement pas grand chose à voir, mais ça je laisse les gens en faire leur propre analyse !

Est-ce cet album qui a marqué le début de votre renommée, où l'a t-elle simplement renforcée ? Car il me semble que vous avez déjà un Sonisphere en 2010 …

Sébastien : Nous avons participé à deux Sonisphere en fait, "The End Starts Here" est sorti en janvier 2010, donc et on a fait début d'été le Sonisphere à Madrid avec Faith no more, Rammstein en tête d’affiche et plein d’autres… Et du coup il se trouve que le Big Boss de ce festival itinérant a accroché sur notre musique et il nous a rappelés pour nous inviter pour le Sonisphere anglais qui a eu lieu quinze jours après avec Iron Maiden en tête d’affiche. Quand on eu la proposition, malgré que nous étions tous partis en vacances, on a dû réfléchir un quart de seconde pour dire oui.

Antony : Du coup cela a été compliqué de réunir le groupe car on était aux quatre coins de la France, mais il fallait absolument qu’on le fasse.

Sébastien : Il se trouve que cette opportunité-là nous permet de retourner en Angleterre pour une dizaine de dates avec My Ruin, le groupe de la chanteuse Tairrie B (ex Tura Satana, ex Manhole). On A vraiment hâte d’y retourner car c’est le vrai pays du rock !

C’est votre première tournée à l’étranger ?

Antony : Nous avons souvent joué en Belgique et en Suisse, en fait on y va assez régulièrement... Mais dix dates d’affilée en Angleterre on peut dire que c’est notre vraie première tournée à l'étranger, on pourrait avoir des occasions pour tourner ailleurs, sur Caen il y a une scène underground assez développée où les groupes ont des plans pour tourner au japon et au Etat Unis. On aurait pu en profiter, mais partir pour partir: dormir tous les soirs dans son camion, n'avoir rien à manger…, on n’a pas trop envie de tourner dans ces conditions-là. Là, avec My Ruin, ce n’est que des bonnes salles et en plus on finit avec le Hammerfest, le soir où nous passons on partage l'affiche avec Biohazard et Accept. Cela vaut le coup de se déplacer !

Qu'est ce qui vous a amené ce soir à Cannes ?

Antony : En fait nous avons plein de potes dans la région, c’est pour ça que l'on joue souvent ici.

Sébastien : Tout simplement parce que nos deux premiers albums sont sortis sur un label marseillais.

Antony : On ne citera pas son nom car c’est un label de merde ! Ils nous ont arnaqués !

Sébastien : Surtout son gérant, il nous doit encore des thunes d'ailleurs ! Du coup à l’époque nous avons eu un management et tourneur à Marseille, donc cela nous a permis d’avoir pas mal de connaissance en P.A.C.A. Ce qui nous amène aussi à jouer quelque part, ce sont des gens ou des associations qui organisent des concerts en France ou en Europe, puis généralement ils prennent contact avec notre tourneur, puis c’est des négociations qui se font entre eux.

Romain : Pour cette date, on remercie le groupe Heart Attack et l'association Dead Rose Clothing qui ont beaucoup insisté auprès de la MJC Picaud pour que l'on vienne jouer ici ce soir.

Vous connaissez un peu ce qu'ils font ? Ainsi que Vetha ?

Romain : Heart Attack c’est pas mal, à la fois thrash et rock'n roll puis ça sonne bien en live. Par contre Vetha je ne connais pas.

En fait, Vetha est un groupe genre Deathcore, sûrement le plus violent sur l'affiche de ce soir.

Sébastien : Tu sais, cela nous gène pas trop, notre musique nous permet de partager l’affiche avec des groupes de tous styles, Rock, Metal, Death… on a joué il y a quelques semaines avec Wishbone Ash, The Elektrocution, hier avec Mass Hysteria… Pour nous cela ne pose aucun problème tant que cela reste dans l'esprit et que cela se passe bien… Quand on part en tournée, on le fait aussi pour rencontrer des gens, c’est super important de savoir par qui tu es accueilli, ce qu'ils font tous dans le reste de l'année. Aujourd'hui, quand nous sommes arrivés à la MJC, j'ai essayé de capter l’esprit du lieu en demandant ce qui se faisait ici, cela nous a permis d’apprendre qu'il y avait une salle de cinéma, des cours de donnés (musique, danse, art plastique)… Nous ne voyons pas l'intérêt de rester dans notre bulle, la musique c’est avant tout du partage. Je suis persuadé que tout ça se ressent sur scène !

Depuis que vous tournez, quelle est la date qui vous a le plus marquée ?

Antony : Même s'il est plus petit que l’anglais, je pense au Sonisphere à Madrid, hormis notre passage, comme c'était la première fois que l’on participait à un tel événement, nous avons apprécié chaque seconde, tu te rends compte on a partagé les loges avec Kerry King, j’ai regardé la prestation de Slayer à coté de Mike Patton… Je pense que je m'en rappellerai toute ma vie.

Sébastien : Moi je suis incapable de te le dire, bien entendu je me souviendrai du premier Sonisphere, voir le nom d'Headcharger sur une affiche à coté de celui d'Alice In Chains, un mes groupes préférés, cela fait kiffer. Mais point de vue strictement scénique, j'ai autant pris mon pied dans de plus petites salles, j'estime toujours que ce n’est pas la grandeur de l'événement qui fait que le ressenti du concert soit plus ou moins bon. Si cela se trouve, après la date de ce soir, je te dirai peut-être que c'est la meilleure… Ou la plus pourrie (rires) !

Vous vous attendez à quelle ambiance ce soir ?

Sébastien : On espère la teuf ! On espère que les gens feront du bordel ce soir, nous sommes là pour ça. Toute façon on essaye toujours d’être à deux cents pour cent en live, donc s'ils ne bougent pas, on ira les chercher !

Pour finir, nous aurons une question plus terre à terre. Arrivez-vous à vivre de votre musique ou avez-vous un boulot à côté ?

Sébastien : A partir du moment où il y a les mots rock et France dans la même phrase, il y a le mot travail qui n’est pas loin derrière. Pour scène rock et métal Française, je ne connais que Gogira et Mass Hysteria qui arrivent à vivre de leur musique. Pour le moment, nous, nous bossons tous à côté.

Antony : Dans l'ensemble, nous sommes tous dans la musique. Babz donne des cours de gratte, Romain est dans l'événementiel, moi je suis ingénieur du son, il n'y a que Seb, le looser du groupe (rires)…

Sébastien : Oui, je suis gardien de parking, mais il y a un magasin de musique pas loin et des fois j'y vais (rires)…

Antony : Nous avons dans l'ensemble un rythme de vie qui nous permet d’être disponibles pour les concerts que l’on nous propose.

Sébastien : Si on reprend le sens de ta question, en vivre non, mais c'est quand même la musique qui nous occupe le plus dans notre emploi du temps hebdomadaire.

L'entretien se termine, pouvez-vous nous dire un petit mot de fin ?

Tenez bon ! Soutenez la scène metal française, c’est une musique qui ne fait pas partie de la culture en France et si vous les webzines ainsi que les radios associatives vous ne joueriez pas le jeu de transmettre toutes ces infos et de soutenir cette scène, il n'y a personne qui le ferait. Hormis vous et les fans entre eux, personne ne parle du metal en France. Donc continuez et merci à vous !


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